Vincent Geisser, Hani Ramadan et Hassan Iquioussen :
une sainte trinité prêche au Bourget pour l'UOIF




Les congrès de l'UOIF au Bourget se suivent et se ressemblent. Même vieux fond idéologique des Frères Musulmans, même forte proportion de femmes voilées, mêmes barbus, même littérature obscurantiste et mêmes intervenants toujours aussi éloignés des valeurs de progrès, d'émancipation et de liberté. Hommes et femmes sont séparés dans l'assistance. Du fait de sa forte affluence, le rassemblement annuel est devenu le rendez-vous d'une autre population d'intervenants, non musulmans, avec, pour l'édition 2006, des cléricaux comme le père Michel Lelong (un habitué), le pasteur Marcel Manoel, des élus de droite (Christine Boutin, Jacques P. Martin, Claude Pernès), Olivier Roy (directeur de recherche au CNRS reconverti dans l'assistance à l'islam politique) et Vincent Geisser, sociologue et calomniateur né pour lequel toute critique de l'islam révèlerait des motivations racistes.

Pendant quatre jours, les gigantesques hangars du Bourget ont résonné au son des conférences, des prêches, des chants religieux et des appels à la prière. Le dimanche 7 mai, la bonne parole a été diffusée par une sainte trinité constituée par un islamogauchiste, un pédagogue de la lapidation et un antisémite. Premier à s'exprimer, Vincent Geisser est intervenu sur l'islamophobie et l'anti mahométisme. Il est, à la tribune de l'UOIF, en terrain conquis. Caution intellectuelle bon marché des jeunes filles en foulard, Geisser est venu en "ami". Présenté comme tel, il renvoie naturellement la politesse à l'UOIF, comme Nicolas Sarkozy en 2003 à la même tribune.

Déjà invité au Bourget en 2004, Geisser exploite un filon qu'il sait porteur : attaquer ou moquer l'islam ou ses représentations serait un détournement raciste de la liberté d'expression. Simpliste mais efficace. Rien de surprenant donc dans le propos d'un sociologue dont la célébrité auprès de la oumma ne serait rien sans son étiquette d'universitaire. Vincent Geisser, particulièrement virulent, hargneux, a joué la carte de l'amalgame entre caricature d'une religion et haine des croyants et a caressé les barbus dans le sens du poil. Comme il n'est pas de limite à l'excès, l'orateur a fait de Charlie Hebdo une publication chérie par l'extrême droite en affirmant que l'hebdomadaire aurait multiplié ses ventes par dix ou vingt grâce à un lectorat brun et raciste alors que le tirage de Charlie n'a été multiplié que par trois ou quatre et qu'il est lu par des bouffeurs de curés, d'imams et de rabbins.

Mais l'universitaire ne souhaite cependant ni une loi contre l'islamophobie ni la réinstauration du délit de blasphème. La réponse est en fait plus subtile : c'est au nom du respect des individus que la liberté d'expression doit être bridée. Et dans sa défense des croyants, il n'évite pas quelques accents paternalistes, ceux-là même qu'il croit voir chez certains politiciens voulant borner la liberté d'expression par le respect des opinions. Pourtant, un autre élément s'est dessiné chez l'orateur : l'évocation de lui-même. Vincent Geisser ne limite pas son propos à l'islam mais l'accompagne d'un sujet omniprésent : sa propre personne. Il mentionne ses conférences, ses voyages, se cite lui-même et assure son auto promotion. L'islam est une religion de servitude et on n'est jamais si bien servi que par soi-même.

A l'obsession islamophile de Geisser a succédé la froide sérénité de Hani Ramadan, le frère de l'autre. Si Hani et Tariq constituent les deux faces d'une même pièce, Hani ne revêt aucun masque et est plus direct, comme le lectorat du Monde avait pu le constater avec effroi dans un article qui y était paru en 2002 sous le titre "La charia incomprise". Au Bourget, Hani Ramadan a délivré le dogme, le verbe calme, assuré, parfois imprécateur, toujours glacial. Dogmatique implacable, Ramadan suit le Coran à la lettre et n'autorise aucune déviation ni existence en dehors de l'islam : "le Coran nous enseigne qu'il n'y a rien dans la création, dans les cieux et sur Terre, qui ne soit soumis de gré ou de force au créateur". On s'explique mal, alors, l'existence du matérialisme dans un monde totalement inféodé à Dieu : "le combat de tous les prophètes [qui] a été de lutter contre l'idolâtrie et le matérialisme" apparaît paradoxalement comme le signe de l'impuissance de Dieu à créer un monde à l'abri du péril rationaliste. Heureusement, "la faculté prophétique permet de corriger les erreurs la raison". Le sermon du directeur du Centre Islamique de Genève s'acharne ensuite sur "la loi de la causalité [qui] devient fautive quand on veut l'appliquer à Dieu". Ou Dieu en dehors de la science, air connu. Plus proche des attentes de l'assistance, Hani Ramadan rappelle que le Coran impose aux femmes de cacher leurs cheveux. Une conférence du frère de Tariq est donc un effrayant retour dans un passé obscur où l'individu enchaîné végète dans un autre monde, hyper dogmatique, autoritaire, superstitieux, où l'individualité de chacun est niée par la soumission absolue aux mythes ("l'homme a été créé pour adorer Dieu").

Enfin, troisième larron, Hassan Iquioussen a montré qu'il était digne de figurer aux côtés des deux précédents. Ses prêches sont fort appréciés chez les jeunes musulmans mais L'Humanité puis Le Figaro avaient révélé le caractère antisémite de certaines de ses conférences. Sa participation au congrès de l'UOIF vaut donc absolution. Acclamé à son arrivée, Hassan Iquioussen a joué la carte jeunes. Vêtu d'un vêtement de sport blanc à capuche griffé JMF (Jeunes Musulmans de France), il parle sans note, use de mots simples et ne recourt à aucune référence à de sombres théologiens des siècles passés. Très pieux, il vante la crainte de Dieu, le jeûne et l'engagement accru pour la religion qui assurera le salut d'une jeunesse "fainéante". Culpabiliser pour mieux soumettre, une vieille méthode toujours utile. Ce moralisme passe d'autant mieux que l'homme est jeune et n'offre pas la face ennuyeuse d'un vieux cheikh.

Geisser, Ramadan et Iquioussen sont trois facettes de l'islam d'aujourd'hui. L'UOIF réussit l'habileté de marier la caution universitaire d'un kafir compatissant à la rigidité d'un obsédé du dogme en passant par le faux modernisme d'une jeunesse réactionnaire. La recette semble prendre et nombreux sont les cléricaux non musulmans à s'allier aux fous de Dieu pour apporter leur offrande au sacrifice de la laïcité sur l'autel d'Allah.

6 mai 2006


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