Le communautarisme musulman à l'assaut des élections européennes




Cette fois c'est décidé : l'Union Française pour la Cohésion Nationale présentera bien une liste aux élections européennes pour la circonscription d'Île de France. Après son pitoyable abandon aux régionales du mois de mars (tous ses candidats n'étaient pas inscrits sur les listes électorales !), le parti groupusculaire de Mustapha Lounes compte bien entrer le 13 juin dans la modernité du jeu politique européen. On attend donc de l'UFCN qu'elle se prononce, par exemple, sur l'élargissement à vingt cinq, sur le vote de la Constitution, qu'elle apporte des idées neuves en matière de social et d'emploi, ou encore qu'elle fasse entendre sa voix sur la question d'une armée européenne ou des enjeux écologiques comme le ferroutage. Mais à trop en attendre de l'UFCN, l'électeur court le risque de la déception.

Dans le tract de campagne diffusé sur sa liste électronique, on chercherait en vain de telles propositions, voire même un simple intérêt pour l'Europe qui témoignerait d'une réflexion sérieuse sur la situation. Les ambitions européennes de l'UFCN se résument au souhait d'un "Union Européenne forte et indépendante" "protégeant les acquis sociaux", souhait auquel on ne peut qu'adhérer mais un peu trop lapidaire pour dispenser de précisions supplémentaires. L'UFCN est, par contre, beaucoup plus loquace sur des sujets qui, bien que constituant d'évidentes préoccupations pour l'Union européenne, n'en relèvent pas en première priorité. Pour les amis de Mustapha Lounes, l'Europe c'est avant tout le Tibet, la Palestine, l'Irak, la Tchétchénie ; l'Europe c'est la lutte contre l'islamophobie (ce travestissement en racisme de la critique d'une religion) ; l'Europe c'est enfin "le droit au retour des réfugiés".

Tout cela ayant un fort parfum d'égocentrisme et de communautarisme musulman, il n'est pas sûr que l'UFCN réussisse ainsi son entrée en politique. Toutefois, Mustapha Lounes a eu l'idée brillante de confier la première place de sa liste à une femme, Faouzia Zebdi-Ghorab. La deuxième place est occupée par lui-même puisque sa période d'inéligibilité est parvenue à échéance. On aura donc l'infini plaisir, dans les réunions électorales de l'UFCN, d'admirer le délicat hidjab de Mme Zebdi-Ghorab (voir photo sur www.ufcn.org), de fines dentelles qui ornent un visage dont on ne doute pas qu'il constitue un exemple rêvé d'émancipation pour toutes celles qui cherchent désespérément à se débarrasser de cette incarcération textile. Une femme voilée en tête de liste, remercions l'UFCN d'y avoir pensé. Le voile devient un attribut de coquetterie qui, par sa fière exhibition, renvoie l'argument de la pudeur musulmane à la catégorie des hypocrisies qu'il n'aurait jamais dû quitter. L'UFCN montre là une vraie cohérence dans sa stratégie après sa participation aux manifestations de voilées qui ont obscurci les rues parisiennes il y a quelques mois.

Dans un entretien au site saphirnet.info, Faouzia Zebdi-Ghorab ose l'insulte de comparer les lois racistes de Vichy au mouvement pour une loi contre les signes religieux à l'école : "Il s’est passé une chose assez grave cette année en France : notre parlement a voté une loi à destination d’une population ciblée. A une autre époque, ce type de loi fut appelé « loi d’exception ». Celle-ci a consacré officiellement un racisme." Et c'est bien au fait de la campagne actuelle du Vatican pour la réévangélisation de l'Europe que Faouzia Zebdi-Ghorab s'active à la promotion d'un héritage musulman pour le continent : "Il ne faut pas oublier que l’une des controverses qui ont animé la rédaction du futur projet de constitution de l’Union Européenne portait sur les racines judéo-chrétiennes de l’Europe. Affirmer un tel mensonge c’est nier tout l’héritage musulman à l’Europe."

Mais au-delà du simple port du voile islamiste, la candidature, en habit religieux, de Mme Zebdi-Ghorab est surtout une atteinte au principe de non ingérence du religieux dans la vie politique. Comment oser prétendre siéger au Parlement européen quand on arbore sa foi, et sa soumission à l'ordre machiste, de façon aussi peu discrète ? Imagine-t-on un député brandir la Bible à la tribune de Strasbourg ou de Bruxelles ? Christine Boutin et la droite catholique, oui, sans doute, mais pas les laïques. L'UFCN souhaiterait tester la force de la laïcité qu'elle ne s'y prendrait pas autrement. Mustapha Lounes ne cache plus son aversion pour la relégation de la religion dans les affaires strictement privées. Ses éructions sur l'islamophobie sous couvert de lutte contre le racisme ne sont que la nostalgie des temps anciens où la religion s'imposait à tous avec autorité. Pour l'UFCN, la religion doit participer aux décisions de la vie politique et s'afficher dans les lieux de pouvoirs.


8 juin 2004, mis à jour le 19 juin 2004


Résultat des élections du 13 juin 2004 : 983 voix soit 0,04 % pour la liste UFCN en Île de France, un résultat très encourageant qui laisse une immense marge de progression au mouvement de Mustapha Lounes.


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