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Bernadette Chirac et Christine Boutin tous voiles dehors
La Mosquée de Paris, l'UOIF et Tariq Ramadan n'osaient rêver de telles
alliées : Bernadette Chirac et Christine Boutin volent au secours des
femmes voilées dans un élan où il est moins question de droits de
femmes que de solidarité cléricale. La première, une femme qui aime à se
présenter humble et discrète en se répandant peu en discours, a opté pour
l'exhibition de la pudeur féminine : c'est coiffée d'une mantille que
l'épouse du président de la République s'est présentée devant le pape Jean
Paul II lors de la béatification de mère Teresa dont on se demande quel lien
elle entretenait avec la France. C'est avec un déguisement identique que Mme
Chirac avait rendu visite au même despote quelques années auparavant, en
1996, pour l'intronisation de son cher époux comme protochanoine de Saint
Jean de Latran.
Fort heureusement pour la première dame de France, et gage
que sa présence au Vatican n'avait rien de privé, le Premier ministre
Jean-Pierre Raffarin, accompagné de son épouse et d'une cohorte d'une
quarantaine de personnes, a lui aussi fait le déplacement au Vatican au
grand mépris de la séparation entre l'Etat et l'Eglise. Coût estimé par le
Canard Enchaîné (22 octobre 2003) : 100 000 euros ! Insulte suprême aux fondements d'une
république qu'il est censé incarner, le déplacement de Jean-Pierre Raffarin
est une illustration supplémentaire de son mépris pour la société française
soumise aux dogmes du MEDEF et sacrifiée sur l'autel du CAC 40. Mépris pour
les chômeurs, désintérêt pour les malades et ignorance des personnes âgées,
la
laïcité, à son tour, n'est plus au gouvernement que l'objet de sarcasmes.
Mais le gouvernement c'est aussi l'UMP et sa représentation au Parlement.
Ainsi, la députée UMP Christine Boutin, qu'on aurait tort de reléguer dans
la catégorie d'extrémiste négligeable tant ses éructations sont partagées
sur les bancs de la droite, a apporté sa pierre pour lapider un peu plus les
femmes. Elle a soutenu que certaines des femmes voilées "assument avec fierté
leur liberté de femme" en portant le torchon islamiste. Comme Madame Boutin
est aussi très préoccupée par l'éducation, qu'elle voudrait religieuse, des
enfants, elle estime avec le même détachement qu'on peut "accepter le port
du voile dans l'enceinte de l'école publique comme sur le lieu du travail".
Effectivement, ce serait plus simple, supprimer l'école laïque et rétablir
la messe obligatoire, voilà ce qui fait défaut aux directives de l'Education
Nationale. Et en fine analyste politique, Christine Boutin balaie d'un
revers de la main le problème de l'islam politique qui, loin d'être le fait
d'activistes antidémocratiques, serait dû aux non musulmans qui ont
"stigmatisé le fait de porter le foulard par des musulmanes". Mea culpa, mea
maxima culpa. Honte donc aux ayatollahs de la laïcité, terreau du fanatisme
religieux. Quant au communautarisme, nul ne peut mieux le combattre qu'en
banalisant le port du voile selon la députée... Renverser les valeurs
humanistes pour mieux les combattre en les discréditant par le mensonge et
l'affabulation, voilà ce qui tient lieu de conscience politique à Christine
Boutin.
Les apôtres d'un islam qui, pour être français, doit être politique, se
réjouiront de l'aide inespérée des dévotes du catholicisme le plus
conservateur. L'œcuménisme, cet écran de fumée dont sont tant friands les
publications religieuses, est moins le résultat de la révélation soudaine de
convergences théologiques qu'une réaction contre
le danger commun : la laïcité.
8 novembre 2003
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