Un erouv à Saint Brice : l'accaparement de l'espace public par l'obscurantisme religieux
Imaginons une microsociété où une des règles de vie consiste, certains jours, à ne pas transporter des objets depuis son domicile vers le domicile public ou l'inverse. Interdit, c'est comme ça et on ne discute pas. La mesure est, on le comprend bien, fort handicapante et certains plus malins que d'autres ont, avec une autorité empreinte d'un mysticisme obscur, inventé un stratagème pour s'en affranchir : il suffit de délimiter un espace avec des poteaux d'au moins quarante centimètres et de les relier, à leur sommet, par un fil métallique. L'interdit ne s'applique plus à l'intérieur de l'enclos ainsi défini et les objets peuvent y être déplacés sans aucune contrainte. Bien entendu, tout cela est d'une stupidité insondable, un enfant de cinq ans s'en amuserait. D'autant plus absurde que la Torah en établit la prescription...
Cette délimitation de l'espace public a, en fait, un nom : un erouv. Le système est déjà pratiqué en Israël, au Canada, et peut-être bientôt dans la commune de Saint-Brice en région parisienne ! Avec l'installation de ce fil qui entourerait toute la commune, les plus fanatiques des juifs de Saint-Brice pourraient donc, pendant le chabbat, vaquer à leurs occupations quotidiennes sans subir l'interdit de la loi du portage, les chanceux. Moins satisfaits seraient les autres citoyens de Saint-Brice qui verraient leur commune envahie par un obscurantisme digne des époques les plus archaïques. Outre le fatras irrationnel qui entoure la justification religieuse de l'erouv, son installation est un accaparement inacceptable de l'espace public par une religion, avec la bénédiction de la mairie. Sans une mobilisation laïque importante, le communautarisme juif aboutira, dans le Val D'Oise, à une aberration où, au 21e siècle, des fanatiques porteront gaiement des objets chaque fin de semaine grâce à un fil tendu au-dessus de leurs têtes.
Source : La Gazette (hebdomadaire du Val d'Oise) 8 février 2006
26 mars 2006
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