Reconversion non religieuse de plusieurs églises à Rouen





Si on veut rester poli, on dira que la baisse de fréquentation des églises catholiques soulève la question de leur devenir. Si on choisit d'être plus brutal, on décidera que la chute vertigineuse dans l'assistance aux offices religieux impose d'en finir avec l'utilisation religieuse des temples catholiques de la superstition et du fanatisme. Plutôt que de les raser pour en faire des parkings, les affecter à des fonctions non confessionnelles les met utilement au service de tous sans les réserver à l'usage des adeptes d'une secte minoritaire. Rouen et son agglomération ont choisi cette voie et pas moins de sept églises ont subi une telle mutation positive.

La ville dans laquelle Victor Hugo voyait cent clochers (Les Feuilles d'automne) en a perdu au moins cinq qui sont libres, depuis longtemps, de toute pitrerie monothéiste :
- l'église Saint-Laurent est devenue en 1921 le musée Le Secq des Tournelles consacré à la ferronerie. On y expose une collection remarquable de clefs et de serrures.
- la chapelle Saint-Louis, place de la Rougemare, est un théâtre. Débarrassée de sa fonction religieuse en 1796, elle est utilisée successivement comme magasin aux fourrages, école, dépôt de matériel, gymnase municipal. C'est en 1977 qu'elle devient un lieu culturel et elle est dédiée au théâtre en 1991.
- une chapelle du couvent des Ursulines est devenue une bibliothèque municipale. Située près de la place de la Croix de Pierre, l'offre de lecture proposée apparaît d'autant plus essentielle dans ce quartier délaissé où les commerces de kebab hallal se multiplient.
- dans l'église Sainte-Croix-des-Pelletiers, près de la place du Vieux-Marché, on donne désormais des concerts, après qu'elle ait aussi abrité des réunions politiques. Elle a été désaffectée à la Révolution.
- l'église abbatiale Saint-Ouen ne connaît plus le formol des messes et est utilisée pour des évènement culturels. Désaffectée, elle aussi, à la Révolution, elle est toutefois revenue au culte catholique pendant un temps pour l'abandonner définitivement ensuite. La mairie de Rouen s'est installée dans l'ancien dortoir des moines quelques années après la Révolution. En juin 2009, l'église a servi de cadre à un court métrage sur Jeanne d'Arc qui périt brûlée à Rouen en 1431. Quelques jours auparavant, plusieurs gerbes avaient été déposées dans l'église en mémoire de la bergère de la part de divers élus : la Députée Maire Valérie Fourneyron, la Région de Haute Normandie et le Président de Seine-Maritime !

Le phénomène étant global, il n'est pas limité à Rouen et s'étend aux communes voisines :
- à Saint-Aubin-lès-Elbeuf, l'église du couvent du Sacré Cœur de Jésus (130, rue de Freneuse) n'entend plus de messes souffreteuses mais reçoit des événements culturels organisés par la commune. Une vingtaine de religieuses sont encore dans les lieux.
- à Petit-Quevilly, des expositions et des concerts ont lieu à la chapelle Saint-Julien.

Une pétition étonnante et demeurée confidentielle, initiée par de "vieilles familles catholiques normandes", a demandé que soient détruites deux églises rouennaises dans lesquelles le culte catholique n'est plus pratiqué depuis une dizaine d'années. La raison invoquée brille de simplicité, de radicalisme et d'aigreur face aux usages "profanes" : "Une bonne église désaffectée est une église détruite."


A lire aussi, sur atheisme.org, l'affectation d'églises à des usages non religieux à Dijon, Sarlat, Chartres, Lyon et l'enjeu actuel.


4 juin 2010


Les gerbes déposées par les élus en 2009 en hommage à Jeanne d'Arc dans l'église abbatiale Saint-Ouen, à Rouen (photo du 6 juin 2009)


La chapelle Saint-Julien à Petit-Quevilly

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