La province de la frontière du nord ouest au Pakistan instaure la charia et devient un nouveau régime de Talibans
Extrait du bulletin de Rationalist International n°110, 19 juin 2003, traduction Guy Jacquesson
Rationalist International condamne l'instauration de la loi islamique dans la Province du Nord-Ouest
Dans une lettre adressée au Président Moucharaf, Rationalist International a vigoureusement condamné l'instauration de la Charia dans la Province de la Frontière du Nord-Ouest et réclamé du gouvernement qu'il prenne des mesures pour stopper la talibanisation de cette province.
Le 2 juin 2002, à Peshawar, l'Assemblée a adopté le texte dit "Shariat Bill", ou loi sur la Charia, faisant ainsi de la Province de la Frontière du Nord-Ouest la première à adopter la loi islamique. Après un vote par acclamations, la décision prise à l'unanimité fut accueillie par les membres de l'Assemblée par un cri de triomphe: "Allah est grand! Allah est grand!". Les opposants étaient trop peu nombreux et trop effrayés pour pouvoir s'opposer à l'offensive des religieux.
La Province de la Frontière du Nord-Ouest, située à la frontière de l'Afghanistan, est le foyer traditionnel du fondamentalisme religieux. Depuis les élections d'octobre 2002 dominées par la coalition radicale des six partis Mutahida-Majlis-e-Amal, elle évolue rapidement vers la talibanisation. L'instauration de la Charia marque déjà la fin des libertés civiles. Elle implique la création d'un système juridique parallèle, basé sur la religion, ainsi que des changements profonds dans le système d'éducation et celui des finances, qui seront mis en conformité avec le Coran par des comités spéciaux. L'opposition, trop peu nombreuse à l'Assemblée, et terrorisée, n'a pas osé s'opposer à l'offensive des religieux. Le gouvernement central d'Islamabad semble hésiter à contrecarrer les développements alarmants auxquels on assiste dans la Province de la Frontière du Nord-Ouest: quand les manifestants fondamentalistes ont célébré le vote du texte sur la Charia en se déchaînant dans les rues, en détruisant les connexions aux câbles des télévisions par satellite, et arrachant les affiches des publicités montrant des femmes, la police, demeurée sous les ordres du gouvernement national, n'a pas bougé.
Quelques jours seulement après l'adoption de la Charia, la "loi Hisba", est venue fournir une base légale pour l'établissement du "Département de la Hisba", une copie conforme du terrifiant "Département de la prévention du Vice et de la promotion de la Vertu" des Talibans. En instituant un système parallèle dans les domaines de la loi, de la politique et de la police, la Province de la Frontière du Nord-Ouest tombe sous le contrôle complet des fondamentalistes.
En six mois, le Mutahida-Majlis-e-Amal a déjà banni l'alcool, interdit la musique dans les édifices publics et les autobus, changé les uniformes des écoles de garçons en remplaçant chemises et pantalons "occidentaux" par la kurta traditionnelle, et contraint les filles a se couvrir la tête. Les médecins-hommes des hôpitaux ne sont plus autorisés désormais à soigner les femmes. Depuis le 1er juin, bureaux, écoles et magasins doivent être fermés pendant la prière, pour que tous les hommes puissent aller à la mosquée, et les cinq prières par jour sont obligatoires pour le personnel.
Porté vers la victoire par la vague anti-US, le Mutahida-Majlis-e-Amal n'a pas seulement conquis le pouvoir dans la Province de la Frontière du Nord-Ouest aux élections d'octobre; il pourrait aussi disposer de presque un quart des sièges à l'Assemblée Nationale. Il fait campagne pour un Pakistan taliban, et réclame l'instauration de la Charia dans tout le pays.
Et pendant ce temps-là, les services de renseignement confirment que la plupart des anciens dirigeants talibans ont survécu, et se cachent au Pakistan.
25 juin 2003
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