L'Observatoire Lunaire des Musulmans de France : toujours se méfier du calendrier du facteur





On n'est jamais trop prudent : au cas où les astronomes ne sachent plus calculer la trajectoire de la Lune, rien ne vaut un télescope amateur avec un pieux barbu derrière l'oculaire, muni du Coran. L'Observatoire Lunaire des Musulmans de France (OLMF) est une jeune association qui effectue, en plusieurs points de France, des observations de la Lune dans les heures qui suivent la nouvelle Lune afin de détecter la première apparition de son très fin croissant. Ce qui constitue un défi toujours intéressant pour les amateurs d'astronomie est ici, au contraire, un vieux réflexe obscurantiste : il s'agit de déterminer le début du mois musulman par l'observation plutôt que par la consultation du calendrier. Les chamailleries qui accompagnent, chaque année, la détermination du début du mois de Ramadan relèvent du même obscurantisme. Reproduire à l'identique une pratique archaïque n'est pas la marque d'une véritable acceptation de la modernité, même si ce terme est très inadapté : les Grecs savaient déjà calculer l'apparition des phases de la Lune, de même que les Arabes et tant d'autres peuples. Refuser d'accorder sa confiance au calendrier calculé pour, plutôt, persister à guetter le phénomène est une illustration de l'arriération anti-scientifique qui sévit encore dans l'islam.

En 2015 persiste donc une pratique qui n'avait sa validité qu'auprès de tribus isolées du VIIème siècle pour lesquelles l'observation de la Lune était le seul moyen de se répérer dans le calendrier, en l'absence d'éphémérides disponibles. A Bayonne, la Rochelle, Toulon, etc., des musulmans sortent leur télescope chaque fin de mois lunaire dans l'attente impatiente du premier croissant du mois suivant. Twitter rend compte rapidement de leurs déboires (souvent) ou de leur succès (plus rarement), l'opération étant évidemment très tributaire de la météorologie. Il suffit d'un nuage islamophobe pour mettre la détermination du mois en échec.

Le décalage est immense entre la valeur spirituelle accordée au phénomène et sa banalité scientifique : les observations sont consignées sur le site olmf.fr avec les noms et signatures des observateurs, une précision totalement ridicule. Il importe en fait, par cette procédure dérisoire, de conférer une importance indue à un acte qui en est totalement dépourvu. Un exemple parmi d'autres est donné par l'échec de l'observation du 27 Juin 2014 à la Rochelle, qui devait pourtant marquer le début du Ramadan. En guise de preuve du ratage, on exhibe une photo d'un ciel sombre et nuageux. Aucun astronome amateur n'oserait publier une telle stupidité.

Plus généralement, la démarche est identique à celle des illuminés qui, chaque 21 juin, se pressent à Stonehenge (Angleterre) au lever du soleil pour y multiplier les rituels et les invocations. Ce besoin d'un ailleurs spirituel greffé sur l'observation astronomique est moins le signe d'une aptitude à la rêverie ou à la réflexion qu'un refus de la rigueur sientifique basée sur le déterminisme de la mécanique céleste (inutile de jouer les érudits en réclamant la prise en compte du phénomène du chaos ici). Mieux vaut, pour le confort de la croyance, une nature incomprise et incompréhensible.



31 mai 2015

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