Communiqué des personnels du lycée La Martinière à Lyon

septembre 2003




Avec la rentrée scolaire, s'ouvre aussi une période décisive pour l'Ecole de la République. Le service public de l'Education, doit relever le défi qui lui est imposé par ceux et celles qui s'attaquent à la Laïcité. Les pouvoirs publics, sous la pression du réel (83% de gréviste dans le plus grand lycée de la région pour obtenir la tenue du Conseil de Discipline afin de sanctionner une élève portant le foulard islamique dans l'ensemble des cours, élections du Conseil Français du Culte Musulman) ont décidé la création de 2 commissions afin d'ouvrir une réflexion sur « les signes religieux à l'Ecole » et plus généralement sur la Laïcité.

Les personnels du Lycée La Martinière, confrontés au problème du foulard, se sont opposés au Recteur de l'Académie, car ce dernier a imposé la « suspension » du Conseil de discipline convoqué pour statuer sur le problème posé par une jeune fille portant un foulard motivé par des convictions religieuses. Les défenseurs d'une laïcité «plurielle », « tolérante » se prononcent contre l'adoption d'une loi destinée à interdire le port de tout signe religieux ostentatoire à l'école . Il nous faut affronter, dans ce dur combat ceux qui font le lit du communautarisme et qui confortent les mouvements religieux intégristes dans leur mise en cause des valeurs de la République tout en bafouant les droits des femmes. L'assemblée des personnels réunis ce jour constate que la hiérarchie locale tente d'occulter la réalité. Le Recteur de l'Académie , lors de la réunion des chefs d'établissements leur a signifié que la question du foulard ne constituait pas un problème et qu'il fallait l'accepter (pas de vagues.).

Dans notre établissement, il nous faut attendre la rentrée des élèves pour recenser les foulards et autres signes ostentatoires, et nous sommes déterminés d'une part à continuer notre action interne pour obtenir le respect du règlement intérieur et d'autre part à agir en externe pour peser dans la consultation qui s'ouvre. Il est indispensable de réussir le rassemblement de tous ceux qui sont engagés dans ce combat pour la défense de la Laïcité. Notre texte de pétition a réuni un peu plus de 1500 signatures qui manifestent le soutien d'individus mais aussi de mouvements associatifs. Il nous faut élargir et renforcer notre base pour emporter le défi. Pour cela, nous avons décidé d'associer notre engagement aux cotés des signataires de l'Appel du 6 mai. Notre but est commun : obtenir l'interdiction des manifestations religieuses dans l'Ecole de la République.

Aujourd'hui, les enfants de l'école de la République peuvent se prévaloir d'un droit consacré par la loi de 1989 sur l'Ecole. Ils sont en effet membres de droit de la Communauté Educative. L'élève, comme tout autre membre des établissements publics d'éducation doit donc être rappelé au respect de ses devoirs. La Laïcité ne peut pas être un principe d'organisation politique à géométrie variable : strict pour les adultes et laxiste pour les élèves. Nous disons, à ceux qui prétendent refuser l'amalgame et l'enfermement dans un faux débat et qui considèrent que ceux qui luttent pour préserver un espace de neutralité et de liberté de toutes les consciences sont nécessairement rétifs à toutes les autres luttes qu'il convient également de mener, que nous sommes engagés dans ce combat et dans les autres (retraites, décentralisation.) car ils ont pour point commun, le même désengagement de l'Etat devant les injonctions aussi différentes que celle issue de l'économie libérale comme de celle portée par les intégrismes religieux. L'abandon (délibéré ou non) des principes humanistes fondateurs de la République traduit pareillement le fatalisme devant l'économie libérale et le laxisme devant le fanatisme religieux. Face à ces deux tentations et devant ces deux menaces, nous devons réaffirmer le principe souverain de la Laïcité : en effet, ce n'est pas l'option spirituelle de chacun qui garantit un espace démocratique paisible, c'est plutôt le principe de Laïcité, contesté par ceux-là même qui font l'amalgame entre son simple respect et une posture liberticide. L'Ecole Laïque est seule capable de délier les individus pour les conduire à une véritable émancipation. Le modèle français est porteur de valeurs supérieures au modèle anglo-saxon qui s'accommode fort bien de la logique communautariste qui ne circonvient pas aux intérêts marchands.

Il faut donc une loi pour revenir à l'application stricte du principe constitutionnel et ainsi surmonter la jurisprudence du Conseil d'Etat (1989) qui a répondu juridiquement (de manière très contestable : cf. la Convention de New York sur les droits des femmes) à une question de nature sociale et politique. Le meilleur moyen de s'opposer aux fanatismes des religieux, aux nationalismes xénophobes c'est de défendre les valeurs républicaines souveraines en France, tandis que la défense du communautarisme fait le lit du Vote « le Pen ». Nationalistes et Communautaristes refusent chacun à leur façon, le modèle d'assimilation et d'émancipation rendu possible par la Laïcité.

Contacts : Jean-Claude Santana


    Contact