Le soutien du catholicisme français au franquisme dans Le Pèlerin





Le soutien enthousiaste de l'Église espagnole au franquisme est bien connu mais que sait-on du catholicisme français sur la guerre civile espagnole de 1936 à 1939 ? La consultation de la presse d'époque est toujours instructive et balaie rapidement la réécriture de l'histoire qui peut apparaître ultérieurement. Ainsi deux éditions de l'hebdomadaire Le Pèlerin de 1937 affichent sans aucune ambiguïté que le catholicisme français était bien du côté des franquistes.

Sur sa première de couverture, Le Pèlerin du 24 janvier 1937 présente deux hommes armés avec des haut-parleurs en arrière-plan. La légende apprend que l'apport de la technologie de la radiodiffusion dans les tranchées du front de Madrid ferait du conflit une "guerre moderne", un refrain entendu maintes fois depuis puisque les guerres ont toujours été des catalyseurs pour l'innovation technologique. Rien n'est dit sur l'appartenance politique de ces combattants mais leur tenue vestimentaire permet de les identifier immédiatement comme des carlistes, des Requetés plus précisément. Le béret rouge et le blason en partie masqué (aigle bicéphale) sont les attributs caractéristiques de ces monarchistes, alliés aux franquistes. Ici, le recours au progrès technologique rangerait paradoxalement leur devise archaïque "Pour Dieu, la patrie, le roi" dans le camp du progrès et de la modernité. La communication en temps de guerre serait réduite à néant sans la manipulation classique qui transforme un conflit sanglant en guerre juste une fois recouvert d'un vernis scientifique ou technologique.




"GUERRE MODERNE : Dans les tranchées du front de Madrid, des haut-parleurs ont été placés qui maintiennent les combattants en contact avec le reste du pays. Des speakers viennent également diffuser, sur place, leurs impressions du front."

En pages intérieures, Le Pèlerin réitère son souhait de défaite pour les antifranquistes. Il se réjouit de la prise d'une position républicaine par les franquistes sur le front de Villareal au Pays Basque.



A la fin de cette même année 1937, Le Pèlerin évoque une nouvelle fois la guerre civile, mais côté républicain. Il ne s'agit pas, bien sûr, d'un juste équilibre journalistique mais de convaincre plutôt de l'incapacité des républicains, des anarchistes, du POUM, etc. à gérer une région. Fin 1937 la Catalogne n'est pas encore conquise par les franquistes, elle ne le sera qu'en janvier 1939. Dans sa quatrième de couverture, Le Pèlerin du 12 décembre 1937 représente une discussion entre une mère assise et un combattant républicain debout, identifiable à son calot. Sous le titre attendrissant "La politique des mamans", l'hebdomadaire catholique délivre son fiel : "La presse catalane reconnaîtrait que depuis un mois 2000 personnes seraient mortes de faim à Barcelone et dans ses faubourgs." Avec deux conditionnels, il ne s'agit plus d'information mais de propagande maquillée sous la fausse prudence journalistique. Accablée, avec son bébé dans les bras, la femme impute la famine aux républicains : les "femmes du pays conquis", c'est-à-dire la partie de l'Espagne passée sous la domination franquiste, "sont heureuses : maintenant, leurs gosses mangent !" Le message est limpide : pour avoir du pain, il faut se ranger du côté de Franco.




"- Comment ! Tu envies les femmes du pays conquis !
- Au moins elles sont heureuses : maintenant, leurs gosses mangent !"


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24 mars 2014

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