A Paris, des prières contre une pièce de théâtre
Le 8 décembre, c'est la fête de l'Immaculée Conception. L'Immaculée quoi ? Oui, une de ces vieilleries sans lesquelles le catholicisme n'exhalerait pas l'odeur poussiéreuse des sacristies. Mais le 8 décembre 2011 est aussi la date de la première représentation au Théâtre du Rond-Point à Paris de la pièce Golgota picnic de l'argentin Rodrigo Garcia, et l'extrême droite a multiplié les protestations contre ce spectacle qu'elle considère blasphématoire et christianophobe. Quelques jours auparavant, deux hommes ont été arrêtés pour avoir tenté de détruire le système d'alarme du théâtre. A l'extérieur du théâtre, pour cette première, la police a déployé des forces imposantes :
- quatorze fourgons, quatre camions et un bus sur la place Clémenceau et l'avenue Winston Churchill ;
- une quarantaine de fourgons et un bus autour du théâtre.
Soit un peu plus de trois cents types (chaque fourgon en contient six), pour un total de huit cent d'après Le Monde et l'AFP.
Avant le début de la pièce, à l’appel du collectif Culture et Foi, une cohorte de chrétiens se sont rassemblés devant le théâtre puis se sont dispersés dans le calme. A quelques dizaines de mètres, une cinquantaine de personnes assuraient le théâtre de leur soutien à la programmation de la pièce (drapeaux de la CGT et de la Ligue des Droits de l'Homme, Le Monde et l'AFP mentionnent aussi Alternative Libertaire).
Mais l'essentiel de l'activité de la soirée eut lieu à la cathédrale Leur-Dame (aussi désignée "Notre-Dame" dans l'imaginaire catholique) pour une veillée de prières contre l'affront fait au légendaire JC par la pièce jouée au Théâtre du Rond-Point. Le plus fameux temple parisien de la superstition catholique était comble : hormis la mort d'un pape, on voit rarement autant de croyants dans une église. L'archevêque Vingt-Trois a délivré un sermon sur l'amour de JC et autres fadaises avant une désopilante curiosité du catholicisme parisien : la vénération de la couronne d'épines. La véritable, l'historique, pas une réplique symbolique, ni une imitation frauduleuse. Bienheureux les parisiens qui disposent de ces saintes brindilles qui, deux mille ans après, piquent comme au premier jour. Face à un troupeau de mystiques désespérés, plus c'est idiot, mieux ça passe.
Bref, à la cathédrale, on a prié, on s'est morfondu, on a vénéré on ne sait trop quoi, on s'est convaincu qu'on a souffert (un peu) et que cela suffisait pour se dire encore catholique.
13 décembre 2011
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