Le MRAP enfin devant ses pratiques diffamatoires au procès intenté par Louis Chagnon




La salle de la 17e Chambre correctionnelle du Palais de justice de Paris était pleine ce jeudi 10 février pour soutenir Louis Chagnon. L'ancien professeur d'histoire avait déposé plainte pour diffamation contre le MRAP et Kamel Zmit, responsable d'un comité de parents d'élèves. En septembre 2003, son cours sur le début de l'islam et les activités guerrières de Mahomet lui avait valu des attaques de la part de ce comité ainsi que du MRAP et de la LDH. Le MRAP avait déposé une plainte pour "provocation à la haine raciale envers des personnes de confession musulmane". Après que le rectorat ait donné un blâme à l'enseignant, le MRAP retira sa plainte. Mais Louis Chagnon a décidé de se retourner contre le MRAP et Kamel Zmit et c'est cette affaire qui a été plaidée le 10 février.

Naturellement, Mouloud Aounit était très attendu mais il n'a pas daigné pas venir, évitant ainsi d'avoir à répondre de ses propos dans une situation fort délicate pour son organisation qui sera sur la défensive pendant toute l'audience. L'objet de la plainte est une dépêche de l'AFP du 12 février 2004 dans laquelle Kamel Zmit, médecin anesthésiste, a déclaré de façon erronée que Louis Chagnon avait été sanctionné à l'unanimité du conseil de discipline. Ce terme d'"unanimité" entraîne de graves conséquences sur la réputation de Louis Chagnon, c'est sur cette atteinte à son honneur d'enseignant que dût s'exprimer Kamel Zmit. L'autorité de l'accusé ne repose en fait que sur un collectif de parents d'élèves ne regroupant que sept parents dont seulement trois ont un enfant qui suivait les cours de Louis Chagnon. Et sur ces trois, seuls deux étaient dans la classe où l'enseignant a qualifié Mahomet de "voleur" et d'"assassin". L'assurance de ce collectif groupusculaire est subitement devenu beaucoup plus fragile et la carte de la victimisation fut exploitée comme diversion. Constamment sur la défensive, l'accusé n'a pas été avare de lamentations pour expliquer que les médias ne lui ont pas accordé les tribunes nécessaires à l'explication de son action. Dans une défense hasardeuse sur la façon dont avait été lancée la curée contre l'enseignant, Kamel Zmit a tenté d'expliquer qu'il avait contacté l'AFP sans la contacter vraiment, passant par une amie journaliste qui y travaille, une amie qui, quelques minutes plus tard, est devenue une simple connaissance. La piètre défense s'est fissurée encore un peu plus quand la journaliste en question, Martine Noailles, a déclaré ne connaître Kamel Zmit que dans un cadre professionnel, niant quelque relation amicale que ce soit.

Interrogé en tant que témoin, Jean Flori, historien et ancien directeur de recherche, a insisté sur la nécessité pour l'historien d'avoir un regard critique envers les religions. D'ailleurs, a-t-il précisé, les chroniqueurs musulmans des débuts de l'islam n'hésitaient pas à parler des butins récoltés par les armées de Mahomet. Pire, l'un d'eux, Al Tabari, explique très bien comment Mahomet a autorisé deux de ses disciples à tuer un poète qui s'était moqué de lui. Enfin, il a déploré que l'énoncé de la Shoah soit parfois impossible en classe actuellement.

Louis Chagnon passe ensuite à la barre pour, d'une voix calme et sereine, préciser qu'il n'a jamais dit que Mahomet avait tué plusieurs centaines de juifs "par jour" mais "en un jour". Cependant, il confirme avoir présenté Mahomet comme "un voleur et un assassin" puisque c'est une vérité historique que nul ne conteste. Très à son aise car sûr de sa cause, Louis Chagnon dénonce le "rapport" réalisé par l'inspecteur de l'Education nationale sur lui sans même l'avoir rencontré ! Lors de son passage devant le conseil de discipline, l'enseignant était d'ailleurs soutenu par deux syndicats, FO et le SNALC. Il indique en outre qu'il a été attaqué pour "racisme antimusulman" par le microscopique et peu représentatif collectif de parents d'élèves, chose que Kamel Zmit s'était abstenu de préciser.

Quatre témoins en faveur de Louis Chagnon vont exprimer leur soutien et tous sont enseignants, signe de la difficulté dans laquelle les enseignants sont placés quand la religion est au programme et qu'un regard critique lui est porté. Michel Barbe est le responsable de l'Association des Professeurs d'Histoire Géographie de l'Académie de Marseille et ne manque pas de protester contre les conditions dans lesquelles a été effectuée l'inspection de Louis Chagnon. Sur la question du contenu du cours, Michel Barbe explique qu'il est légitime de décrire les actes de Mahomet dans leur stricte vérité en indiquant aussi leur relation au contexte : "on est des professeurs qui disent les choses qui ont eu lieu". Personne d'ailleurs n'osera contester la véracité des faits rapportés et, auparavant, l'avocat du MRAP avait bien précisé que la séance n'avait pas pour objectif de faire le procès de Mahomet... A son rappel que doit être prise en compte la culture des élèves quand un sujet religieux est abordé, Michel Barbe répond finement qu'il faut aussi tenir compte de leur inculture. Quand à l'avocate de Kamel Zmit, elle ne craint pas de se demander si le massacre des tribus juives est un fait réellement important et s'il méritait d'être mentionné dans le cours de cinquième incriminé... Le vice président du SNALC apporte son analyse peu après en allant à l'essentiel : le blâme est équivalent à "sanctionner un blasphème". Il estime que si un enseignant est raciste il est normal qu'il ne soit plus autorisé à enseigner mais qu'"on ne peut pas confondre race et religion".

Professeur d'économie et de gestion à Lyon, Jean-Claude Santana relève l'incohérence de la sanction prononcée par le rectorat : sachant que le blâme est une sanction relativement légère, un cours effectivement raciste aurait dû conduire à une sanction beaucoup plus grave. Le blâme a donc ici pour seul effet d'attenter à l'honneur de Louis Chagnon et c'est très judicieusement que Jean Claude Santana dénonce "certaines organisations qui réclament le délit de blasphème", comprendre le MRAP avec la récente déclaration de Mouloud Aounit sur France 3. Pour le professeur du Lycée La Martinière, dont l'expérience en matière de lutte contre l'islamisme s'est construite sur le terrain, le métier de professeur consiste à "émanciper les jeunes à l'aide de la raison". Enfin, Santana, dont il n'est pas dans ses habitudes de prendre la parole pour se répandre en banalités, rappelle l'attitude inacceptable des administrations qui sont tentées de faire peser sur les enseignants les tensions provoquées par le communautarisme religieux. C'est fort de sa propre expérience qu'il s'exprime puisque, lors d'une des premières affaires de voile en 2003, il avait lui aussi été l'objet d'une menace de sanction de la part du rectorat.

Enfin, Kebir Jbil conclut les manifestations de soutien à Louis Chagnon en désignant, lui aussi et sans fard, la stratégie poursuivie par le MRAP : "le MRAP soutient les thèses qui veulent la censure de la critique des religions". Kebir Jbil est le courageux et dynamique président du Mouvement des Maghrébins Laïques de France et il a insisté sur la culture laïque que lui ont transmise ses parents musulmans. Assurément l'islam familial n'était pas celui du site oumma.com qui a appelé ses lecteurs à une présence massive au procès. Mais cette mobilisation islamiquement correcte fut complètement absente, signe de la position indéfendable dans laquelle s'est fourvoyé le MRAP.

La plaidoirie de l'avocat de Louis Chagnon s'est attachée à examiner les fondements de l'affaire. En rappelant la perte du procès intenté par l'AGRIF contre l'affiche du film Amen, il précise que "la diffamation ne protège pas la sensibilité religieuse" et que la critique de la genèse d'une religion n'entre pas dans le cadre de la diffamation. On ne saurait être plus clair et mieux délimiter le problème. Quant à la stratégie du MRAP qui se croit détenteur d'"une pseudo autorité morale" , elle n'honore pas l'organisation puisqu'elle est essentiellement axée sur un effet d'annonce vis-à-vis des médias sans oser poursuivre la procédure jusqu'au bout, la plainte ayant été retirée. La Procureur de la République confirmera le caractère diffamatoire des propos du MRAP contenu dans la citation à comparaître adressée à Louis Chagnon. Elle estime que "la démarche du MRAP n'est pas loyale" et qu'il y a "beaucoup d'hypocrisie dans la démarche du MRAP". L'absence de Mouloud Aounit lui aura évité le ridicule d'entendre pareille réprimande. Mais la magistrate est "très embarrassée" et, dans une pirouette étonnante, estime que le MRAP avait le droit de présenter sa réaction ainsi, elle veut croire à sa bonne foi.

L'avocat du MRAP, conscient de son isolement, appellera la LDH à son secours en rappelant qu'elle avait déclaré que "les propos [de Louis Chagnon] sont d'une extrême gravité". Dans une plaidoirie assez confuse où les arguments décisifs seront particulièrement absents, il réaffirme que les propos de l'enseignant "sont provocateurs à la haine", ou comment s'enferrer un peu plus dans une nasse inextricable. Doit-on comprendre que la vérité doit être dissimulée quand elle dérange ? A sa suite, l'avocate de Kamel Zmit conclura la séance en s'enfonçant un peu plus dans le marécage de la défense de l'islam. Elle reproche l'usage du mot "assassin" (mais comment qualifier autrement ces actes ?) et tente piteusement d'atténuer la culpabilité du prophète en citant Maxime Rodinson pour qui ce massacre des tribus juives "était la meilleure solution politique" pour la première armée de l'islam. Avec l'énergie désordonnée d'un combattant perdu, elle n'hésite pas à affirmer que les parents d'élèves ont eu "une démarche laïque" et, à l'instar de son client, joue elle aussi la victimisation. En appeler à l'émotion n'est pas la plus solide des défenses... Et dans une ultime manipulation, l'avocate de Kamel Zmit qualifie de "sulfureux" le Mouvement des Maghrébins Laïques de France et range les soutiens de Louis Chagnon dans la catégorie infamante de l'extrême droite. Accuser l'autre de la peste évite de s'y confronter, la méthode n'est pas nouvelle au MRAP.

Après le procès Houellebecq qui avait rangé à leur place quelques apprentis censeurs adeptes du même monothéisme, la citation à comparaître déposée par Louis Chagnon a eu le mérite de faire comparaître le MRAP et de le mettre face à ses affinités islamistes. Constamment sur la défensive, les accusés et leurs défenseurs n'ont pu trouver matière à renverser la situation et c'est à un enseignant à l'argumentation précise et bien assurée qu'ils ont été confrontés. Le MRAP a subi un revers symbolique qui nourrira un peu plus la contestation interne au mouvement. Discrédité depuis longtemps par les orientations islamiques de son combat antiraciste, c'est désormais la question du maintien du financement public de l'organisation qui est posée. Le jugement sera rendu le 24 mars.


Voir aussi l'ensemble de l'affaire


23 février 2005


Note du 18 novembre 2011 : J’apprends, avec beaucoup de retard, que Louis Chagnon a été « membre de la direction du parti de la France de Carl Lang jusqu'en mars 2011 » et qu’il est « proche de Bernard Antony, directeur du mouvement Chrétienté solidarité » d’après le blog du Monde Droite(s) Extrême(s) du 4 novembre 2011. Le parcours politique de Louis Chagnon est catastrophique et totalement contre-productif pour la revendication du droit à la critique de l’islam au même titre que les autres sectes. Cet affichage à l’extrême droite est un véritable cadeau pour les islamogauchistes.


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