Le judaïsme et l'obsession alimentaire
Soucieux de proposer au fidèle une alimentation, sinon équilibrée, du moins permise par les dieux, le Consistoire de Paris, créé par un décret napoléonien de 1808, dresse une liste exhaustive des aliments casher. À défaut de méditer sur les questions essentielles de l'existence humaine, les superstitieux ont l'illusion de satisfaire leur divinité en mangeant ceci ou en n'ingérant pas cela. Même si un dieu gastronome est très préférable à un dieu vengeur, l'indissociabilité de ces deux caractères rend assez bien compte de la pauvreté spirituelle d'une religion qui proscrit l'utilisation des sachets de levure sèche de boulangerie fournis avec les préparations à pizza...
Les interdits alimentaires, qui ne se limitent pas au dégoût du porc, prennent en charge l'estomac du juif de son lever à son coucher. Au petit déjeuner, le pieux croyant pourra consommer des biscottes et des céréales à condition qu'elles aient été prélevées au rayon diététique. Toutefois, la vigilance du croyant devra lui faire prêter attention à l'usage des Achkenazim selon lequel "les BISCOTTES et PAINS CÉRÉAL bien que neutres (sans lait) ne sont pas à tartiner avec de la viande, ni à mettre en bouche avec de la viande (règle du Nat bar Nat)". Cela méritait d'être dit pour éviter de grands périls.
Après une matinée de prières et avoir glorifié "dieu" de ne pas l'avoir fait femme, le croyant prendra une repas bien mérité composé, par exemple, de poisson, un aliment qui demeure mangeable bien qu'il soit devenu le symbole des premiers chrétiens (ICHTUS). La liste des poissons autorisés est précise et quelques recommandations sont néanmoins à observer. L'affamé pourra manger du saumon, mais pas de la saumonette, de la carpe, mais pas de la carpe à cuir. Quant à la carpe miroir, "il faut vérifier la présence d'écailles". Le péché, insidieux et sournois, guette toujours le goinfre dans sa gourmandise peu scrupuleuse. Le croyant sera bien inspiré d'accompagner son poisson de légumes en barquettes, de toutes spécialités, sans toutefois s'abandonner à ingérer des betteraves en dés Bio ou du maïs, précision évidente mais pas superflue. Le plat pourra être aromatisé à l'aide d'épices déshydratées qui seront à choisir uniquement dans des marques fabriquées en France et non mélangées ! De plus, "l'ail, l'échalote, les oignons déshydratés ne sont à utiliser qu'en lamelles, lanières ou semoule" et on exclura vigoureusement les poudres. Pas de place pour l'à peu près dans les épices casher. Enfin, en guise de dessert, il se délectera d'une crème dessert Danone en évitant impérativement le produit Danette à boire au chocolat ou au caramel. On n'ose envisager la sanction divine. Le repas se conclut par une bonne tisane en sachet. Cela va sans dire mais cela va mieux en le disant, interdiction formelle de boire celles contenant des arômes ou du sucre de raisin. Le croyant est maintenant prêt à retourner à sa yeshiva pour se purifier l'âme avant le repas du soir.
24 avril 2004
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