La laïcité selon Jean Baubérot

C'est une bien particulière défense de la laïcité que Jean Baubérot a offert aux lecteurs du Monde le 4 janvier 2004 : "Pouvons-nous - en matière de laïcité - presque tout concéder aux Alsaciens-Mosellans et pratiquement rien aux musulmans ?"

Si la question est juste, les lois de la République ne peuvent manquer d'être appliquées uniformément sur l'ensemble du territoire, la réponse suggérée par Jean Baubérot recommande, par contre, l'indulgence envers l'islam au titre que la spécificité de l'Alsace Moselle et de quelques départements et territoires d'Outre Mer n'a pas été contestée dans les propositions de la Commission Stasi. Pour Jean Baubérot, le foulard est une "obsession nationale" ce qui ne saurait mieux relativiser la nocivité du torchon islamiste. Et son rejet de la solution laïque éclate quand il s'abandonne à estimer que "la laïcité française apparaît plus cléricale que, par exemple, la laïcité dont parle la Cour constitutionnelle italienne." À quand un colloque sur la laïcité au Vatican ?

Que Jean Baubérot avoue sa préférence pour une laïcité vidée de sa substance est son affaire. Par contre, on ne peut pas ne pas s'alarmer du fait qu'il soit aussi, et surtout, titulaire de la chaire d'histoire et sociologie de la laïcité à l'Ecole pratique des hautes études de Paris et directeur de la section des sciences religieuses du même établissement. C'est en vertu de cet adoubement universitaire qu'il est un intervenant omniprésent pour les questions religieuses. Sa présence dans la Commission Stasi en est un des exemples. Baubérot y a été le seul à refuser le principe d'une loi et c'est las de cet isolement que, depuis, il a pris son bâton de pèlerin pour arpenter les colonnes du Monde (4 janvier 2004), de L'Humanité (18 décembre 2003) et de Libération (15 décembre 2003, avec une pique lancée contre la "catholaïcité", les haines historiques sont tenaces depuis Luther).

Autre tentative de récupération, la présentation de la thèse sur la laïcité en Europe de Benoît Mély par Jean Baubérot qui fut scandaleusement mandaté par l'Union Rationaliste pour son émission mensuelle sur France Culture le 26 octobre 2003. Mais le huguenot est, sans pitié, renvoyé en son temple par Henri Pena-Ruiz dans d'autres pages, celles du dernier ouvrage de ce professeur de philosophie doublé d'un pédagogue de talent, lui aussi membre de la Commission Stasi : La laïcité, un recueil de textes très riche sur les relations entre la puissance politique et les institutions religieuses.


12 janvier 2004