François Baroin : quand le cléricalisme se pare du visage de la laïcité
Dans un article très instructif paru dans le Figaro du 29 avril 2003, le député UMP François Barroin révèle les intentions réelles de la droite quand celle-ci prétend défendre la laïcité en s'opposant au port du voile. On assiste actuellement à une véritable avalanche de déclarations laïques à l'UMP (Ferry, Darcos, Sarkozy, Raffarin, Baroin, Myard, Meslot et Leroy de l'UDF), jamais le mot laïcité n'était apparu avec une telle fréquence dans les colonnes du Figaro. Mais cette subite conversion chez les élus de droite n'est que l'expression du rejet du communautarisme musulman sans réellement refuser l'intrusion des religions dans l'enseignement ou au niveau européen.
Les huées récoltées par le ministre de l'Intérieur Nicolas Sarkozy le 19 avril 2003 ont suscité moult vocations de militants laïques à l'UMP. Parmi celles-ci, François Baroin, député maire de Troyes et vice-président de l'Assemblée nationale, s'est fendu d'une déclaration de foi supplémentaire sur cette laïcité qui doit s'opposer au port du foulard islamique. Certes, certes, il est heureux que cette opinion soit affirmée avec force quand d'autres se taisent, ou se terrent, après des années de flagornerie communautariste. Pourtant, l'opposition au port du voile apparaît en fait comme un préambule à d'autres mesures dont l'esprit laïque est plus obscur...
Ainsi, François Baroin se prononce pour la création d'une faculté de théologie musulmane alors que la formation des imams, qui serait l'objectif d'un tel institut, est une affaire qui ne concerne que les musulmans et ne doit pas engager pas l'Etat. Le député maire de Troyes poursuit en suggérant qu'une "laïcité décomplexée" devrait accepter des expériences d'enseignement des religions dans des établissements pilotes pour ensuite déplorer les moyens insuffisants dont disposent les aumôneries dans les établissements publics. Au nom de quel principe l'Etat serait-il tenu d'assurer un service d'endoctrinement des superstitions au sein de ses institutions ?
Après ces suggestions, Baroin se déclare favorable au développement du dialogue entre l'Etat et les religions via un nouveau Conseil consultatif des religions de France. Chevènement et Sarkozy ont fait naître le CFCM, Jospin a donné une tribune officielle aux catholiques, le visionnaire Baroin voit encore plus loin et vise l'œcuménisme... On notera que les incroyants sont oubliés dans cet appel à la parole. Et comme une laïcité bien comprise ne saurait oublier les "problèmes financiers" des religions, il propose la création d'un "don spiritualité" qui permettrait aux contribuables de déduire de leur impôt sur le revenu une somme correspondant à des dons effectués à des associations cultuelles. Diminuer l'impôt de l'Etat au profit des curés, imams et rabbins, quelle modernité dans ce retour de la dîme moyenâgeuse ! Et, emporté par son élan, François Baroin ose demander le retour de l'uniforme à l'école comme moyen de lutter contre la frénésie des marques. La camisole de force pourrait aussi être remise au goût du jour pour certains parlementaires en mal de célébrité...
Source : Le Figaro 29 avril 2003
5 mai 2003
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