Benoît XVI disciple de ... Ratzinger
Un article de Jocelyn Bézecourt et Gérard da Silva, adressé au quotidien Libération et non publié.
Selon A.Meddeb (Libération du 16 octobre), il faudrait comprendre la conférence de Benoît XVI du 12 septembre " en la replaçant dans la tradition de la philologie allemande... et ce n'est pas coutumier qu'un pape s'exprime à partir d'une telle rigueur qui entretient la complexité et l'exigence par le moyen d'une raison supérieure ". Pourquoi pas, sinon que la source centrale de Benoît XVI est en fait son écrit Dominus Iesus, rédigé en tant que Joseph Ratzinger, préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, le 9 août 2000. Ratzinger y expose que " pour remédier à cette mentalité relativiste toujours plus répandue, il faut réaffirmer avant tout que la révélation de Jésus-Christ est définitive et complète. "
Ce qui a deux conséquences non moins explicites (D.I.,5 et 6): " Est donc contraire à la foi de l'Église la thèse qui soutient le caractère limité, incomplet et imparfait de la révélation de Jésus-Christ, qui compléterait la révélation présente dans les autres religions. [...] Par conséquent, les livres sacrés des autres religions qui de fait nourrissent et dirigent l'existence de leurs adeptes, reçoivent du mystère du Christ les éléments de bonté et de grâce qu'ils contiennent ".
Ratzinger en déduit, quant à la relation du Vatican avec les autres religions, que l'origine divine et l'efficacité du salut sont propres aux sacrements chrétiens. Le salut christique s'étendrait à toute l'humanité ce qui, incidemment, rejette le relativisme prétendant que toutes les religions se valent. Les adeptes des autres religions seraient alors acculés à un véritablement dénuement spirituel face au salut : " S'il est vrai que les adeptes d'autres religions peuvent recevoir la grâce divine, il n'est pas moins certain qu'objectivement ils se trouvent dans une situation de grave indigence par rapport à ceux qui, dans l'Église, ont la plénitude des moyens de salut. "
La cause est entendue. Inutile d'invoquer un quelconque dialogue entre les religions puisque seule la catholique a la précellence ! Dans le discours de Ratisbonne, il s'agit d'une union des religions mais sous la houlette de la catholique, et seulement, afin de faire passer la Raison sous les fourches caudines de cet œcuménisme de façade. L'absolutisme catholique, anti démocratique dans ses principes, se retrouve de Dominus Iesus au discours de Ratisbonne, qui réfèrent aux encycliques de Jean Paul II, Redemptoris Missio et Fides et Ratio.
Pour autant, cette croyance absolutiste n'est-elle pas, par essence, le fait de toutes les religions ? Citons-en une: " Ils ont pris leurs rabbins et leurs moines, ainsi que le Christ fils de Marie, comme Seigneurs en dehors d'Allah, alors qu'on ne leur a commandé que d'adorer un Dieu unique. Pas de divinité à part Lui ! Gloire à Lui ! Il est au-dessus de ce qu'ils [Lui] associent. " (Coran, sourate 9, verset 31 ). La cause est doublement entendue. Que les religions ne jouent donc point la comédie du dialogue démocratique. Dans l'Histoire, nous l'avons tous constaté, seule la laïcité, la stricte séparation des Églises et de l'État, est la base démocratique. Aux États Unis d'Amérique, le premier amendement de la Constitution de 1791 stipule qu'aucune loi ne pourra établir l'institutionnalisation d'une religion ou interdire son libre exercice. Puis viendra, en France, la loi de 1905, remise en cause frontalement par la loi de Pétain du 25 décembre 1942, et qui montrera, plus que jamais, qu'elle est un facteur de paix civile, pourvu que l'ensemble des dispositions cléricales qui la parasitent soient abrogées et que les recommandations du rapport Sarkozy -Machelon n'entrent pas en application.
5 décembre 2006
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