En Autriche le clergé assume mal son passé nazi
Yahoo! News, 19 novembre 2002
Un livre intitulé "Gruess Gott und Heil Hitler" (Salut à Dieu et Heil Hitler) sème le trouble dans les bonnes consciences catholiques autrichiennes. Le clergé de ce beau pays qui a vu grandir Kurt Waldheim et Jorg Haider est dans la plus grande colère devant la sortie d'un ouvrage dénonçant le passé nazi de l'Eglise catholique autrichienne. L'auteur, Stefan Moritz, a mené une enquête très patiente et documentée pour établir que des prêtres et évêques pro nazi avaient tout fait pour étouffer le drame de l'extermination des juifs et qu'ils avaient aussi œuvré à la fuite des criminels après la fin de la guerre. Et une source privilégiée d'information fut les archives paroissiales... On y apprend ainsi que:
- en 1942, au cours d'une conférence d'évêques autrichiens, les convois en direction des camps furent rapidement passés sous silence.
- le jésuite Mario von Galli qualifiait les juifs de "meurtriers de Dieu" et disait qu'ils méritaient les persécutions qui leur étaient infligées.
- les tsiganes n'ont pas, eux non plus, échappé à la vindicte du clergé qui appelait à leur dénonciation auprès de la police.
- le journal paroissial Erdberger Pfarrblatt encourageait les catholiques à clamer "Un peuple, un Reich, un Fuehrer, un Dieu".
- des religieux, dont l'évêque Alois Hudal, ont aidé près de 50000 criminels de guerre à s'échapper ou à se cacher à l'issue de la guerre, avec pour certains d'entre eux l'émigration vers l'Amérique du Sud organisée par le Vatican. Parmi eux, Franz Stangl, commandant du camp de Treblinka en Pologne (800000 juifs massacrés) reçut cette aide du clergé et fut arrêté vingt ans après au Brésil.
La liste est longue et accablante pour une religion qui a toujours su s'allier avec les puissants, bien armés de préférence.
Mais l'enquête de Stefan Moritz s'est heurtée à la persistance, toujours vivace actuellement, des idées nazies chez quelques catholiques autrichiens. Dans ses entretiens téléphoniques il a pu entendre crier "Heil Hitler" ou proférer des accusations selon lesquelles il serait juif car "seul un juif pourrait écrire des immondices pareils" alors qu'il n'est pas juif. L'auteur n'oublie pourtant pas de mentionner que quelques ecclésiastiques se sont opposés à cette adoration des nazis comme ce fut le cas pour Franz Reinisch. Mais la sanction dont il fut l'objet est éloquente: d'abord interdit de prêche, il fut ensuite exclu de son ordre et exécuté en 1942 pour avoir refusé de servir Hitler et de rejoindre son armée.
25 novembre 2002
|