Contre la nocivité des religions, la loi de 1905 ne suffit pas
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Le grand combat de la IIIe République fut la pose d'un éteignoir sur le cléricalisme. Loi sur les congrégations, laïcisation de l'espace public, donc de l'école, et séparation des Églises et de l'État ont constitué un succès historique après des siècles d'oppression par la pieuvre catholique. Les tentatives précédentes de 1795 et 1871 trouvaient enfin leur concrétisation. Gloire donc aux valeureux militants qui, à la charnière des 19e et 20e siècles, ont permis de contenir les ensoutanés dans leurs sacristies poussiéreuses, bravo, mille bravos.
Pourtant, la loi de 1905 n'est qu'une étape car, comme dans tout débat, elle est le résultat d'un compromis entre diverses tendances laïques. Il ne s'agit pas ici de contester la pratique du compromis qui est un composant de la marche du progrès en démocratie. Mais il incombe aux continuateurs, ensuite, de dissiper les derniers restes de cléricalisme que la loi de séparation autorise encore dans son texte. On comprend bien que, historiquement, une rupture totale n'est que rarement possible et qu'il faille en passer par des transitions. Parmi les concessions faites aux christicoles, l'article 2, en plus d'affirmer dans le marbre que la République ne salarie ni ne subventionne aucun culte, maintient la présence d'aumôneries dans les établissement d'enseignements. Curieux aménagement d'une loi qui, d'un côté, prépare l'autonomie intellectuelle des enfants en repoussant le curé hors des salles de classe mais, dans le même temps, lui permet de poursuivre son travail d'intoxication des jeunes consciences dans les aumôneries.
La loi de 1905 offre d'autres cadeaux dans ses articles 13 et 19, en plus de l'article 4 : les lieux de culte sont confiés gratuitement aux associations cultuelles et les réparations des édifices incombent aux collectivités publiques. A la lueur de ces dispositions, la réticence actuelle de l'Église à une révision de la loi de 1905 est finalement peu surprenante, il s'agit de conserver ce qui peut encore l'être. Car elle est passée très près de l'expulsion totale : la Révolution et la Commune avaient transformé de nombreux temples de la superstition et du fanatisme en lieux de débats populaires où le peuple a pu véritablement s'exercer à la démocratie directe.
Aujourd'hui, la secte catholique a toujours la libre disposition de bâtiments qui appartiennent pourtant aux citoyens. Or les églises sont vides et leur affectation à des utilisations non religieuses constituerait un juste prolongement de la Révolution et de la Commune pour casser ce dernier privilège. Le laxisme de politiciens serviles conduit à des situations ahurissantes comme à Paris où l'église Saint-Nicolas-du-Chardonnet héberge depuis près de trente ans la Fraternité Saint Pie X. On y déverse quotidiennement la haine de l'émancipation individuelle, de l'avortement, de la contraception, de l'étranger, de l'athée, etc., pour y prôner plutôt un christianisme viril. Pour plus de détails, se référer au programme du Front National. Bertrand Delanoë, l'expulsion des lefebvristes, c'est pour quand ? Probablement pas pour tout de suite car, d'une part, l'officialisation des disciples de Mgr Lefebvre dans le giron catholique est en bonne voie grâce à Benoît XVI et, d'autre part, le maire de Paris n'est pas avare d'amabilités : il souhaite qu'un lieu parisien porte le nom de Jean Paul II. Ce bel œcuménisme a pleinement satisfait la droite catholique, après les drapeaux en berne sur les établissements publics et la présence compassée des ministres et des préfets aux messes en l'honneur de l'ami Karol.
La trahison de la laïcité réside dans cette collusion entre le politique et le religieux. Les religions seraient devenues respectables et, à l'instar de Nicolas Sarkozy, certains aventuriers comme Manuel Valls proposent un financement public pour la construction des mosquées. Rien de novateur dans ces prosternations, l'alibi de la sauvegarde de la culture et les baux emphytéotiques permettent aussi, et depuis longtemps, de financer les religions avec des fonds publics. Preuve que la loi de 1905 ne suffit pas et que le pas doit être franchi vers un rejet franc des religions qui ne se limite pas, pudiquement, à la dénonciation du cléricalisme. La nocivité des religions ne se réduit pas à leur emprise globale sur les affaires publiques mais s'exprime bien plus douloureusement dans la chair des individus. La nouveauté s'appelle, ici, islam et les victimes en sont souvent les femmes.
Il est patent que certaines organisations n'en ont pas bien pris la mesure et enfouissent leur tête dans le sable mecquois au prétexte que la critique de l'islam serait du racisme. Un islamogauchisme pathologique a ainsi été insufflé à plusieurs cercles médiatiques et associatifs. C'est le quotidien Le Monde, toujours prompt à donner des nouvelles de Tariq Ramadan, Le Monde Diplomatique, Politis, le MRAP, dont le chef avait demandé le rétablissement du délit de blasphème, ou encore la Ligue des Droits de l'Homme. A quoi il faut ajouter quelques idiots utiles, des intellectuels flattés de bénéficier d'une célébrité bon marché auprès des musulmanes voilées.
Il y a donc urgence, pour une certaine gauche et une droite électoraliste antilaïque emmenée par Nicolas Sarkozy, à ouvrir les yeux devant la permanence, aujourd'hui et ici, des préceptes et exhortations barbares et misogynes vomis à profusion dans le texte coranique. Les mariages forcés, le diktat des mâles, le port du voile, cette prison textile qui transforme la fillette en un objet sexuel à préserver en vue du mariage, sont autant d'aveux d'impuissance pour une loi de séparation trop timorée et exploitée par les cléricaux en alimentant la fable que l'essence des religions serait respectable.
Les compromissions, la complaisance, voire la fascination pour le sectarisme islamique, relèvent d'une nouvelle forme de syndrome de Stockholm où l'oppression envoûte. Cette étrange hypnose ne serait pas apparue si aucune distinction n'avait été opérée entre cléricalisme et religion. Toutes les religions sont cléricales et ne peuvent pas ne pas l'être. La lecture de la Bible et du Coran en donne les preuves par dizaines. La laïcité ne pourra garantir une réelle libération qu'en rejetant l'emprise religieuse qui s'exerce aussi bien dans la sphère publique que privée. La lapidation, la loi du talion, l'exhortation au meurtre des mauvais croyants, la soumission de la femme, la guerre sainte et la résignation du faible face à sa condition sont consubstantielles aux mythes monothéistes. L'"extrémisme" religieux est un non sens, il est l'expression fidèle des préceptes inscrits dans les textes dits "sacrés".
Contre la nocivité des religions, la loi de 1905 ne suffit donc pas. La laïcité ne saurait évidemment s'opposer à la pratique personnelle d'une spiritualité mais on ne peut faire l'économie d'un combat plus général contre les religions qui sont, dans leur essence, l'institutionnalisation des croyances au profit d'une caste de gourous. Il est urgent que se développe, aujourd'hui, un véritable militantisme antireligieux.
Le tract
6 décembre 2005
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